Par Pierre

14 octobre 2014

oncle sam

Après plusieurs semaines surchargées qui ne m’ont pas laissé beaucoup de temps pour m’occuper du site, je reprends enfin la plume pour aborder un sujet qui me tient à cœur, à savoir la position dominante de l’anglais parmi les langues étrangères. Si cette thématique est trop vaste pour être traitée en une seule fois, nous nous concentrerons aujourd’hui sur la question de l’utilité d’apprendre d’autres langues si l’on maîtrise déjà l’anglais.

L’anglais, langue mondiale

De nos jours, l’hégémonie de l’anglais est une évidence. Troisième langue par le nombre de locuteurs natifs (c’est-à-dire : dont c’est la langue maternelle) après le mandarin et l’espagnol, l’anglais est également la plus apprise dans le monde. Vu de France, l’apprentissage de l’anglais est non seulement naturel, du fait de la proximité de la Grande-Bretagne, mais il est aussi obligatoire dès le collège.

Un peu d’histoire

Cette position dominante est le résultat d’une lente diffusion depuis l’Angleterre jusqu’aux endroits les plus reculés du Globe, à travers son immense empire colonial. Ce processus a été relativement ininterrompu et s’est fait aux dépens d’autres pays, comme la France, qui a dû céder la quasi-totalité de son premier empire colonial (dont le Québec) au Royaume de Grande-Bretagne en 1763 (Traité de Paris). Vingt ans plus tard, en 1783 (un autre Traité de Paris !), les Etats-Unis obtiennent leur indépendance et commencent eux aussi leur expansion territoriale.
Suite à sa victoire sur la France napoléonienne, le Royaume-Uni devient la première puissance mondiale et le restera jusqu’au début du XXe siècle. Bien qu’immense, l’Empire sort affaibli de la Première Guerre mondiale et commence à se désagréger lorsqu’une partie de l’Irlande accède à l’indépendance en 1921.

empire britannique
En rose, les territoires ayant à un moment ou un autre de leur histoire fait partie de l’Empire Britannique. On comprend mieux l’omniprésence de l’anglais.

En parallèle, les Etats-Unis s’imposent comme la nouvelle grande puissance économique vers la fin du XIXe siècle, position considérablement renforcée au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, qui marque le début d’une longue période de déclin pour l’Europe et l’effondrement de ses empires coloniaux.
Avec l’avènement de nouvelles technologies de communication (radio, télévision, cinéma, informatique), les Etats-Unis vont diffuser leur culture dans le monde entier tout au long du XXe siècle et apparaîtront comme l’unique hyperpuissance lors de l’effondrement du rival soviétique, en 1991.

Ce détour historique n’avait pas pour but de vous endormir, mais de vous montrer que l’hégémonie de l’anglais n’est pas venue toute seule et résulte de la domination, pendant plus de deux siècles, de deux pays issus anglophones. Une domination qui a été à la fois militaire, culturelle et politique.

L’anglais, langue la plus utile ?

Une question facile, qui appelle une réponse rapide : oui, l’anglais est de loin la langue qui vous ouvrira le plus de portes, surtout en tant que Français et Européen. Si, pour le moment, vous ne maîtrisez aucune langue étrangère, je ne peux que vous recommander de vous orienter vers l’anglais. Comme vous pouvez le voir sur la carte ci-dessous, l’écrasante majorité de nos voisins européens ont choisi l’anglais comme deuxième langue, vous aurez ainsi la possibilité de communiquer avec de nombreuses personnes dans le monde, en Europe comme ailleurs.

anglais lv2
Si on exclut les pays anglophones et frontaliers de la Russie, l’anglais est la langue apprise en priorité dans toute l’Union européenne.

L’anglais est également la langue la plus utilisée sur internet, la plus demandée professionnellement et représente la majorité des œuvres culturelles qui nous entourent. Les moyens colossaux récemment déployés par Netflix pour conquérir le marché français en sont une belle démonstration.
Pour conclure cet enfonçage de portes ouvertes, on pourrait en quelque sorte dire que l’anglais est incontestablement la langue dont l’apprentissage est le plus rentable sur le long terme.

De l’intérêt de parler d’autres langues que l’anglais

Si l’apprentissage de l’anglais est quasiment indispensable pour qui souhaite s’ouvrir un peu au monde, s’en tenir à cette seule langue est à mon sens une grave erreur. Voici quelques arguments qui, je l’espère, vous motiveront à faire preuve de plus d’ambition.

Un choix politique ?

Comme expliqué précédemment, l’anglais est la langue de deux nations, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, qui se sont imposées comme des puissances mondiales au cours des deux précédents siècles. Le raisonnement, trop courant, qui veut que seul l’anglais soit nécessaire car « tout le monde parle anglais », est néfaste, car il fait le jeu d’une conception anglo-saxonne du monde, pour laquelle seule cette langue vaut la peine d’être apprise. Ce n’est pas pour rien que les habitants des pays anglophones figurent parmi les mauvais élèves en matière de plurilinguisme.
Il ne s’agit bien sûr pas de tomber dans une anglophobie primaire, mais avouez que pour l’esprit critique, on repassera. Apprendre d’autres langues, c’est s’ouvrir au monde dans sa diversité, à une pluralité de points de vue, mais aussi refuser une société où seul l’anglais vaudrait la peine d’être appris.

Tout le monde ne parle pas anglais

Il n’y aucun mal à parler anglais dans un pays dont on ne maîtrise pas la langue. Après tout, on ne peut pas les apprendre toutes, il faut bien faire des compromis ! Cela étant dit, partir du principe qu’on ne parlera qu’avec des anglophones est extrêmement dommage. Cela revient à se couper de personnes ne maîtrisant pas cette langue, à considérer d’une certaine manière qu’elles n’ont rien d’intéressant à raconter. Si l’on se réfère à la carte ci-dessous (qui, comme la précédente, ne concerne que l’UE), on s’aperçoit vite que les Européens sont loin de tous parler anglais, surtout dans les pays latins, mais ce n’est pas une nouveauté !

anglais europe
Si vous avez de fortes chances de pouvoir discuter en anglais avec des Suédois, ce sera beaucoup moins facile avec des Espagnols.

De la même manière, l’anglais n’est pas forcément la langue la plus utile dans certaines parties de la planète. Par exemple, si vous voyagez en Amérique latine, l’espagnol vous sera d’une plus grande aide. Idem pour l’arabe dans le monde arabe, ou encore le russe dans l’ex-URSS.
Pour pousser le vice un peu plus loin, même aux Etats-Unis, bastion de l’anglophonie, l’espagnol prend une place toujours plus importante : plus de 12% de la population le parle à la maison. A méditer !

Utile professionnellement, mais vite limité

La maîtrise de l’anglais se généralisant, elle n’est plus vraiment un facteur différenciant dans certains métiers. Le fait de parler d’autres langues, plus rares et recherchées, vous permettra ainsi de faire la différence au moment de chercher un travail plus intéressant et rémunérateur.
Dites-vous bien que presque tous les polyglottes parlent anglais : il va falloir consentir à faire quelques efforts pour tirer votre épingle du jeu !

C’est la première langue qui est la plus difficile

En effet, une fois l’anglais bien ancré dans votre tête, il est généralement plus facile d’apprendre une nouvelle langue. Pourquoi, dans ce cas, ne pas tenter une langue germanique, donc proche de l’anglais, comme l’allemand ou le néerlandais ? Ou encore une langue romane, au vocabulaire finalement assez proche, comme l’espagnol ou l’italien ? Vous serez étonné par la rapidité avec laquelle vous mémoriserez les structures et le vocabulaire de ces nouvelles langues.

Aller au fond des choses

Vous établirez toujours une plus grande proximité avec des étrangers, même anglophones, si vous leur parlez dans leur langue maternelle. Débarrassés (du moins de leur côté !) de la barrière de la langue, ils seront plus enclins à se livrer à vous, le lien qui s’établira sera donc plus direct et profond.
Bien qu’il soit tout à fait possible de se faire de très bons amis étrangers en communiquant en anglais, parler leur langue maternelle ne peut être que bénéfique. De la même manière, en voyage, efforcez-vous de retenir les formules de politesse élémentaires. Vous améliorerez considérablement la manière dont on vous percevra et on vous répondra.

Apprendre l’anglais est devenu une étape indispensable si vous souhaitez vous mettre aux langues étrangères. Pour autant, s’en tenir là reviendrait à vous priver d’énormément d’expériences très positives. Trois fois oui à l’anglais, non au tout-anglais.

Sources des cartes : Wikipédia et Jakub Marian.

Pierre

Fondateur du Monde des Langues, j'aide les passionnés de langues à devenir plus autonomes et à atteindre leurs objectifs. J'ai eu l'occasion d'apprendre l'allemand, l'anglais, le finnois, l'italien et le japonais.

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  1. Un bon article qui brise l’idée reçue selon laquelle l’anglais est parlé partout, qui est paradoxalement portée en partie par ceux qui ne parlent pas ou très peu anglais!
    Cependant je trouve extrêmement dommage et même injuste qu’une langue s’impose comme ça au détriment des autres (mais pas complètement heureusement), surtout qu’il y a un moyen bien plus juste et simple: l’espéranto! Car non cette langue est tout sauf inutile. Je ne m’amuserai pas ici à détailler pourquoi. Je me contenterai juste de dire qu’elle est grandement sous-estimée … un peu comme tu le disais pour l’allemand, Pierre!

    1. Voilà, c’est une conviction que j’essaie de faire passer à travers le blog : l’anglais est une langue belle, riche et très utile, mais il serait dommage de s’en contenter.
      Quant à l’espéranto, c’est une langue à part, à laquelle j’aimerais un jour consacrer un article.

    2. Sans doute L’anglais est langue mondiale, Mais aussi la langue français est plus utilisé jusqu’ à le dégrée obligatoire dans les pays francophone comme les pays africains et région Québec.
      Non seulement le Français et l’anglais les plus utiles dans le monde mais aussi espagnole est utilisé avec exigence dans Amérique latine. Au plus dans notre pays, Maroc Espagnole plus utilisé que l’anglais.
      Même si Anglais est une langue utile dans le Commerce, Science et informatique, le Français aussi est une langue scientifique.
      Donc l’utilité de langue dans le monde n’est pas unique sur une seule langue. En effet la connaissance plusieurs langue se donne la valeur. C’est-à-dire quelqu’un sait parler couramment trois langues déférentes, il devient facilement intégrer dans leur travail.
      C’est le cas de quelqu’un voyage beaucoup en déférents pays parlent déférents langue, la connaissance l’autre langue devient important pour lui pour savoir plus et ouvre leur yeux sur déférents culture.
      En ajoutant que la connaissance de plusieurs langue facilite d’avoir plusieurs amis en déférents pays dans la monde.
      A mon avis, L’anglais n’est pas utile dans tous les pays du monde, le Français aussi, L’Arabe et l’Espagnole.
      Tout les langue a une utilité dans certain pays et autre pays devient inutile .

  2. Article fort intéressant et détaillé, merci ! (avec un choix de jolie carte pour illustrer, en plus, ce qui ne gâche rien).
    Je ne peux qu’aller dans le sens du commentaires précédents (sur l’esperanto) en y ajoutant un sens utilitaire qui fait écho à votre paragraphe sur la difficulté décroissante de l’apprentissage des langues (on parle d’effet propédeutique des langues). Étant la langue la plus simple à parler tout en étant très riche (de nombreuses études ont démontré que le niveau de maitrise de la langue anglaise qu’un élève français aura après 6 ans de cours – et c’est également vrai de différentes autres nationalités – s’acquiert, pour la langue esperanto… en 6 mois de cours seulement !), il serait tout à fait logique de l’apprendre systématiquement en première langue.
    Rien à perdre, tout à gagner, puisque là encore de nombreuses études ont montré qu’en un an d’esperanto, suivi d’un an d’anglais, les élèves avaient alors un niveau égal ou supérieur à leurs camarades ayant uniquement fait de l’anglais pendant 2 ans !
    Bref, une langue que j’affectionne tout particulièrement pour de nombreux autres aspects également (dont le gout qu’elle donne pour l’apprentissage des autres langues) mais qui ne sont pas le sujet.

    1. Je n’ai jamais appris l’espéranto, mais je pense qu’on pourrait l’utiliser auprès de personnes « dégoûtées des langues » pour leur faire prendre confiance en leurs capacités.

  3. Pour enrichir ton article, dont je partage l’ensemble de son contenu, voici un article très intelligent sur les mythes et les réalités des usages de l’anglais en milieu universitaire, paru à l’occasion de la loi Fioraso visant à introduire plus de cours en langue anglaise à l’université voilà maintenant deux ans. Oui à l’anglais mais dans un cadre plurilingue – l’expression de la diversité et de la créativité de la pensée n’en seront que plus récompensées – et non hégémonique !

    https://www.cairn.info/revue-le-debat-2014-1-page-127.htm

  4. L’anglais est ma langue maternelle et en voyageant en Europe, en Afrique et en Asie, j’ai trouvé qu’il était toujours assez facile de se faire comprendre et de trouver des gens qui parlaient anglais et je suis totalement d’accord que si on ne parle aucune langue étrangère, l’anglais, c’est un excellent début, mais moi aussi ça me déprime de voir sous-estimer l’importance des autres langues. L’anglais oui, c’est utile mais c’est une grande erreur de penser que tout le monde le parle.

  5. Un petit coup de gueule,

    Comme d’habitude, si quelques dizaines de millions de Mérinos européens font le buzz, par le jeu des conventions économico-politiques serviles, instaurées après la dernière guerre mondiale, il convient de faire la part des choses sur un plan purement « moral ».

    Je considère le monde anglo saxon, surtout celui d’outre atlantique, comme générateur d’in-culture, et il n’est que de voir la traduction des notices techniques pour comprendre l’extrême pauvreté de cette culture dans sa grammaire et ses construction de phrases pour s’en convaincre.
    Donc, bien que je lise et traduise, la plupart des textes anglo-américain, en bon français, je n’ai jamais consenti à m’imprégner de cette langue et surtout pas à la parler, pour éviter de me « faire tirer », comme un canard, en faisant « coin coin ».

    Maintenant faire remonter cette suprématie à la chute Napoléonienne et à l’abandon du Canada, suite à cette lamentable guerre de sept ans, est un peu léger pour vouloir nous astreindre à un « devoir de classe » régulier, bourré de contre culture.

    Je prophétise également, sans grande surprise, pour certains, qu’il suffirait que les USA se prennent le retour de manivelle climato- géologique qui leur pend au nez, pour que cette contamination et cette hégémonie, cesse en quelques décennies.

    Autant les ricains semblaient nous ouvrir à la « reconstruction mercantile » qu’ils ont eux même imposée dans les années 50, autant il est évident qu’ils nous mènent maintenant à l’abîme, avec leur désir obscène de suprématie mondialiste, dépourvu de la moindre empathie et du moindre scrupule. N’oublions jamais que c’est la nation qui comprend le plus grand nombre de personnes sous le seuil de pauvreté, et aussi le plus grand nombre de milliardaires aux fortunes purement opportunistes.

    Ce peuple, bâti sur de nombreux génocides, et une vision esclavagiste confirmée, ne vaut pas, pour le pendre, la solide corde de chanvre qu’il a apprise de ses géniteurs anglais, et n’oublions pas, non plus, qu’il est issu de tous les « bannis » du R.U européens.

    J’ajouterai qu’en regardant une carte de France, il est inéluctable de constater cette fracture, autant spirituelle que culturelle, matérialisée par le massif central, en tant que césure profonde et frontière perceptible, entre une France Romane, et une France pro-anglicane.

    Notre malheur vient du fait que cette capitale parisienne, par le jeu vicieux de sa politique séculaire et de ses alliances, ne peut plus que représenter l’état d’esprit Nord-européen, et nullement le Sud méditerranéen d’obédience romano-carthaginoise par tradition..

    Que les chaînes privées nous abreuvent de minablures cinématographiques, issues de la généralisation du très commercial plan Marshall est déjà un outrage à la vielle Europe et à la diversité de ces peuples, mais ce ne n’est pas parce que nos mentors redessinent à leur gré les contours et la gestion de l’Europe en tentant de supprimer les nations, que cette intention élitiste « aquiline » obtiendra sa pleine réalisation.
    Donc que ceux qui veulent se gaver d’anglicismes, tous azimuts, s’adonnent à leur jeu favori, et que les autres s’en abstiennent, par simple souci d’hygiène et de santé personnelle.

    La réalité actuelle n’est pas qu’un simple asservissement fataliste aux lois économiques du marché contrôlé par des oligarques d’Europe et d’Outre Atlantique, comme l’auteur de cet article, voudrait nous le faire croire, en nous le chantant, en choeur, à la suite de millions d’autres « conquis » du « nouveau monde »

  6. Très interessant avec mon asso l’essaie d’améliorer l’utilisation de
    l ’Espagnol sur Bordeaux en outre pour limiter l’utilisation de l’anglais par exemple dans les facs de Bordeaux les cours sont donnes uniquement en Anglais !

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